C’est de notoriété nationale, la Bretagne est une des régions de France les plus dyna-miques en matière culturelle. Nous sommes riches de 380 festivals,156 salles de spec-tacles,169 cinémas, 53 Musées de France (et des musées associatifs bien plus nom-breux encore), de salons littéraires, de maisons d’édition, d’organes de presse, d’un pa-trimoine bâti et maritime exceptionnel, de fêtes traditionnelles devenues des institutions, de bagadou, d’écoles de musique, de cercles danse, de compagnies théâtrales, d’ateliers de broderie, de dessin et de milliers d’artistes…
Mais notre vie culturelle est aussi particulièrement intense car la pratique amateur est ici foisonnante et souvent rattachée aux vibrantes racines de notre territoire. Chez nous, une fête traditionnelle ne se réduit pas à du folklore, c’est un mode de transmission festif de notre histoire, ce qui fait notre identité. Un fest-noz est le lieu d’un intense bouillon-nement d’expériences musicales et chorégraphiques mêlant tradition et modernité, comme l’a reconnu l’Unesco en 2012 en l’intégrant sur la liste du patrimoine immatériel de l’humanité.
Alors, lorsque le gouvernement annonce l’autorisation d’organiser des événements fes-tifs assis pour de petites jauges cet été, vous comprendrez que depuis la Bretagne, cette décision fait l’effet d’un coup menhir sur la tête. Kenavo Fest-noz, rock, rap et electro. Et bon courage aux acteurs culturels qui ont décidé de chevaucher le tigre, pour réinventer leurs événements, ne pas nous laisser dans le silence ou face à un deuxième été meur-trier. Un festival quel qu’il soit, n’est pas un simple face à face entre artistes et specta-teurs, mais c’est un temps précieux de convivialité entre chanteurs, musiciens, danseurs, festivaliers, pendant lequel se crée une importante mixité sociale, intergénérationnelle, une ouverture à l’autre, un espace de décompression, de respiration et d’échappée. C’est la liberté d’expression artistique et culturelle qui s’exprime dans sa réciprocité et dans le respect de nos droits humains les plus fondamentaux. Là encore c’est l’Unesco qui l’écrit en 2001 dans sa Déclaration universelle sur la diversité culturelle.
Notre association Produit en Bretagne fédère 472 entreprises adhérentes, issues de tous les métiers, soient 110 000 salariés sur les 5 départements de la Bretagne historique. Les entreprises culturelles et touristiques représentent 8% de nos adhérents, presque autant que celles des enseignes de grande et moyenne distribution. Autant vous dire que la cul-ture chez nous n’a pas de prix, mais pèse son poids.
Il en va de la responsabilité sociétale de Produit en Bretagne de lancer un appel à nos dirigeants, pour la mise en place en urgence d’un plan de déconfinement de la culture, avec en priorité l’annonce d’un calendrier pour la réouverture des lieux culturels.
Avec 22 000 emplois liés directement au secteur, artistes, intermittents du spectacle, techniciens, mais aussi acteurs de l’événementiel et structures touristiques intrinsèque-ment liés à ce champ culturel, les retombées économiques de la culture sur notre terri-toire sont essentielles.
Mais la culture ne se réduit pas à une valeur quantifiable. Elle est éminemment quali-fiable ! Ses retombées indirectes sur le tourisme, sa faculté à faire rayonner un territoire, sa propension à tisser du lien social, à donner du sens au vivre ensemble, à nous enri-chir de nos diversités, à mettre de l’émotion dans notre quotidien, font toute l’épaisseur de nos existences. Quand la culture est en danger, nous sommes tous en danger.
Les équipes de nos lieux culturels et structures touristiques, ont établi les mêmes proto-coles que n’importe quelle autre entreprise habilitée à recevoir du public aujourd’hui, pour faire respecter la distanciation physique, les limitations de jauge et les gestes barrières. Il n’est assurément pas plus risqué de faire Paris-Brest en TGV pendant 4 heures que d’assister à un spectacle, à une séance de cinéma ou de visiter un musée. Les Bretons ont besoin de leur culture vivante pour exister. Il est temps d’adapter les me-sures de restrictions et de fermetures liées à la crise sanitaire au regard des situations de chaque région.
La culture fait partie intégrante de notre identité, de notre économie, de notre diversité, de notre dynamisme et des valeurs que nous défendons à Produit en Bretagne, pour « Une Bretagne belle, prospère, solidaire, responsable et ouverte sur le monde ».
Cécile Peltier, animatrice du Collège Culture & création de Produit en Bretagne
Loïc Hénaff, Président de l’Association Produit en Bretagne